Que sont les mycotoxines chez le cheval ?
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Que sont les mycotoxines chez le cheval ?

Dans le monde de l’équitation où la santé et le bien-être du cheval sont des préoccupations primordiales, il existe un danger sournois souvent négligé : les mycotoxines. Ces toxines produites par certains champignons peuvent contaminer les aliments pour chevaux posant ainsi un risque grave pour leur santé.

 

Bien souvent invisibles à l’œil nu, les effets des mycotoxines sur le cheval peut être dévastateurs, allant de problèmes de santé mineurs à des complications graves, voire fatales. Comprendre ce qu’elles sont, comment elles se forment et comment les prévenir est essentiel pour tout propriétaire ou soignant de chevaux soucieux de la santé de leurs animaux.

 

Dans cet article, nous allons découvrir les origines des mycotoxines, leurs impacts sur la santé équine et les meilleures pratiques pour réduire leur présence dans l’alimentation des chevaux.

 

Cheval mangeant devant une clôture

Que sont les mycotoxines ?

L’apparition de champignons

Les mycotoxines sont des toxines produites par diverses espèces de champignons microscopiques. Elles apparaissent dans certaines conditions et peuvent survenir sur des plantes en croissance, récoltées ou stockées. Ces toxines contaminent de nombreuses matières premières d’origine végétale comme les céréales, les fourrages, les noix et les fruits mais aussi les aliments composés qu’elles constituent.

Les différents types de mycotoxines

Les mycotoxines sont divisées en deux groupes :

  • Les toxines des champs: ces champignons se trouvent sur les plantes qui sont toujours aux champs. Ils envahissent les plantes pendant qu’elles poussent.
  • Les toxines du stockage : cette deuxième catégorie regroupe l’ensemble des champignons qui produisent des toxines après la récolte.

Les mycotoxines ayant des conséquences sur la santé de votre cheval

Il y a plus de 300 mycotoxines identifiées à ce jour, mais seulement une trentaine présentent de réelles propriétés toxiques. Il y a trois grands groupes de moisissures qui produisent des mycotoxines dans les céréales affectant les chevaux et autres animaux : Fusarium, Aspergillus et Penicillium.

La famille Fusarium

Où sont présents ces champignons ?

 

Les mycotoxines de la famille Fusarium se trouvent sur les graines avant la récolte. Le développement de cette toxine est favorisé quand les plantes sont exposées à des conditions de sécheresse au début de leur phase de croissance, puis récoltées en période humide. Elles se retrouvent également dans la paille utilisée en tant que litière pour les chevaux.

 

La mycotoxine Fumonisine

 

Les chevaux semblent être les plus sensibles à la mycotoxine Fumonisine, produite par un champignon de la famille Fusarium. Cette toxine est responsable de l’apparition de la leucoencéphalomalacie équine.

 

La leucoencéphalomalacie équine

 

Cette pathologie provoque la nécrose (mort d’un tissu vivant) de la substance blanche du cerveau et du cervelet, ainsi que des problèmes de foie à cause de son action hépatotoxique (Riet-Correa et al., 2013).

 

Les symptômes de la leucoencéphalomalacie équine

 

Cette maladie est caractérisée par une dépression, des troubles d’équilibre et de coordination, un comportement anormal, une tête appuyée contre le mur et souvent la mort (Fink-Gremmels et Spronck, 2013). Le foie peut également être impliqué et les chevaux meurent généralement quelques heures après les signes cliniques. La dose toxique de cette mycotoxine est de l’ordre de 0.6 à 2.1 mg/kg de PV du cheval.

 

Les mycotoxines trichothécènes

 

Autrement connues sous les noms T2 ou DON (déoxynivalénol), les mycotoxines trichothécènes ont un intérêt particulier pour le cheval. Les toxines produites par ces champignons ont des actions nécrosantes, notamment sur la peau et les muqueuses, dont le tube digestif. Elles ont des propriétés anémiques et hémorragiques.

 

Ces toxines peuvent être responsables des avortements tardifs ou des poulains chétifs (Wolter, 2014). La dose maximale conseillée est de 8 mg/ kg d’aliment pour les céréales et produits à base des céréales, et de 5 mg/kg d’aliment complet.

Les familles Aspergillus et Penicillium

Les symptômes de ces mycotoxines chez les chevaux

 

De la famille Aspergillus, l’aflatoxine est le membre le plus répandu de ce groupe. Ces toxines ciblent le foie et les chevaux souffrant d’aflatoxicose présentent des signes d’inappétence, de dépression, de fièvre, de tremblements, d’ataxie et de toux (Fink-Gremmels et Spronck, 2013). Des études suggèrent un lien possible entre l’exposition aux aflatoxines et la maladie pulmonaire obstructive chronique. Une chose rassurante : peu d’épisodes naturels d’aflatoxicose chez le cheval ont été rapportés dans la littérature (Caloni et Cortinovis, 2011).

 

L’apparition de ces champignons

 

Les mycotoxines des familles Aspergillus et Penicillium se forment généralement pendant le stockage. Par exemple, les mycotoxines de Penicillium peuvent être observées dans l’ensilage pré-fané de mauvaise qualité, surtout si de l’air a pénétré dans le film plastique.

Les mycotoxines des fourrages

Jusqu’ici, nous avons beaucoup parlé des mycotoxines qui se trouvent principalement dans les céréales. Mais il ne faut pas oublier que les mycotoxines se trouvent sur tous types de végétaux notamment les fourrages ainsi que la paille utilisée en tant que litière.

 

Les mycotoxines à l’intérieur de la plante : les endophytes

 

Certains types de moisissures se trouvent à l’intérieur de la plante. On les appelle les endophytes. Ces derniers peuvent être présents dans plusieurs espèces de fourrages :

  • La fétuque élevée : Le foin de fétuque peut être infecté par des endophytes qui produisent le Lolitrem B. Il s’agit d’une neurotoxine qui peut causer des tremblements, des spasmes musculaires et une hypersensibilité (Fink-Gremmels et Spronck, 2013).
  • Le ray-grass : Lorsqu’il est infecté par les endophytes, ces derniers produisent des mycotoxines toxiques pour les équidés.
  • Le trèfle rouge : Cette espèce fourragère est susceptible d’être infectée par une moisissure particulière qui produit une mycotoxine appelée slaframine. Cette mycotoxine provoque des diarrhées, un refus de s’alimenter, une salivation excessive, une insuffisance respiratoire, une production excessive de larmes, des avortements et parfois la mort.

Les problèmes provoqués par les endophytes

 

Les moisissures présentes dans le fourrage peuvent provoquer des problèmes de reproduction entraînant une dystocie (difficultés de poulinage) et une mauvaise production de lait peut être observée dans le cas d’exposition à des alcaloïdes de l’ergot. La bonne nouvelle est que dans beaucoup de cas, il suffit de retirer le cheval du pâturage infecté afin d’inverser tous les signes cliniques.

Le risque d’exposition aux mycotoxines pour les chevaux

La sensibilité du cheval

Malgré sa puissance, votre cheval reste un animal sensible. Le cheval ne peut pas vomir et ne bénéficie pas d’un rumen rempli de micro-organismes jouant un rôle de détoxification des aliments comme chez les ruminants. Cela veut dire que des toxines qui sont ingérées par le cheval sont absorbées dans le tube digestif.

 

L’importance des matières premières

La qualité des aliments et leur bonne conservation sont donc primordiales pour assurer la bonne santé de votre cheval. La ration des chevaux se base sur des fourrages, et selon les besoins, nous pouvons ajouter des céréales ou des aliments composés. Ces matières premières sont toutes susceptibles de contenir des mycotoxines.

 

Cependant, l’une des principales difficultés pour identifier ce risque est que des mycotoxines peuvent être présentes sans qu’il n’y ait de moisissures. De même, toute croissance de moisissure n’indique pas forcément la présence de mycotoxines.

 

Quelles actions pour protéger votre cheval ?

Maintenant que le terme des mycotoxines est défini, une question se pose : comment réduire les risques pour votre cheval ? La plupart des aliments (dont les céréales et les fourrages) pour animaux comportent une forme de contamination naturelle inévitable. Le défi est de minimiser une telle contamination et les risques associés. Mais rassurez-vous, les épidémies aiguës de mycotoxicose sont rares !

 

Bien que nous ne puissions pas éliminer 100 % des mycotoxines, des programmes préventifs doivent être appliqués à différents niveaux de production agricole : production au champ, récolte et stockage, fabrication d’aliments et à l’écurie.

 

L’importance des matières premières

Les pratiques agricoles peuvent réduire la contamination des cultures par les mycotoxines. Cependant, même la meilleure gestion ne peut pas éliminer totalement le risque. Quelques mesures peuvent être appliquées pour réduire la contamination par les mycotoxines :

 

  • La rotation des cultures pour réduire le risque de recontamination l’année suivante.
  • La cultivation des sols permet de réduire la concentration de Fusarium dans la terre.
  • Le contrôle des insectes et des mauvaises herbes.
  • Maintenir une température, une humidité et une ventilation optimale pour le stockage des cultures.
  • Sécher les grains à moins de 13 % d’humidité et maintenir ce niveau d’humidité pendant le stockage.

 

Nous avons de la chance car ces actions font parties des pratiques courantes dans l’agriculture afin de maintenir la qualité des cultures.

 

Contrôle des mycotoxines au niveau de la fabrication des aliments

Au niveau des fabricants d’aliments composés, nous avons plusieurs façons d’intervenir pour réduire le risque de contamination des mycotoxines pour votre cheval.

 

Un plan de contrôle mis en place

Tout d’abord, nous avons un plan de contrôle mis en place pour surveiller une éventuelle contamination par les mycotoxines des matières premières à risque. De ce fait, leur présence est maitrisée avant la fabrication des aliments.

 

Le traitement thermique des matières premières

À la suite, les matières premières utilisées dans les aliments complémentaires subissent un traitement thermique lors de la fabrication des aliments composés. La haute température détruit les champignons et leurs spores, ce qui permet d’arrêter la production des mycotoxines. Cependant, ce traitement ne permet pas de neutraliser la majorité des mycotoxines qui sont thermorésistantes.

 

L’ajout d’absorbants ou de liants

Malgré tous les efforts des producteurs d’aliments pour animaux, les mycotoxines peuvent toujours se retrouver dans les aliments et les fourrages des chevaux. Pour diminuer les effets nocifs de ces mycotoxines chez les animaux, des absorbants ou des liants (organiques ou inorganiques) peuvent être ajoutés à l’alimentation. Ses absorbants ou capteurs se lient aux mycotoxines et les rend indigestibles. Cela contribue à éviter l’absorption des mycotoxines par le tube digestif du cheval et permet de les excréter dans les fèces. Les absorbants inclus plusieurs argiles et zéolites différentes, du charbon actif et des produits de levures (Kihal et al. 2022).

 

Contrôle des mycotoxines à l’écurie

En plus de fournir un aliment composé de qualité pour votre cheval, il y a de nombreuses pratiques de management que vous pouvez mettre en place pour réduire l’impact des mycotoxines sur les chevaux :

 

  • Assurez que votre foin et les aliments complémentaires (céréales ou aliments composés) soient stockés dans un endroit sec et frais avec une ventilation adéquate.
  • Les aliments gâchés par la contamination de l’eau et les aliments humides non consommés doivent être jetés.
  • Respectez la date limite d’utilisation optimale (DLUO) sur les aliments.
  • Nettoyez régulièrement les mangeoires.
  • Inspectez les aliments visuellement et en les sentant avant chaque repas.
  • Faites attention au traitement thermique du foin.
  • Utilisez une paille de qualité, sans tâches noires de moisissure, pour la litière.
  • Ne pas surpâturer les pâturages, car les concentrations de mycotoxines sont plus élevées à la base des plantes.

 

Conclusion

Il est désormais clair que les mycotoxines représentent un danger silencieux mais bien réel pour nos chevaux. Cependant, avec une compréhension approfondie de ces toxines et des mesures préventives adéquates, nous pouvons prendre des mesures significatives pour protéger nos compagnons équins.

 

Pour vous assurer de la qualité de votre fourrage et éviter une contamination due aux mycotoxines, les analyses de fourrage sont recommandées. De plus, cela permet d’ajuster la ration alimentaire de votre cheval pour répondre à ses besoins nutritionnels de manière la plus précise possible. Vous pouvez contacter nos conseillers techniques si vous souhaitez réaliser des analyses de fourrage afin de créer une ration bien équilibrée pour votre cheval.

 

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Bibliographie

Caloni F, et Cortinovis C. 2011. Toxicological effects of aflatoxins in horses. Vet J. 188(3):270-3.

 

Fink-Gremmels, J. et L. Spronck. 2013. Hygienic quality of feed : implications of feed contamination with moulds and mycotoxins on equine health and performance. European Equine Health and Nutrition Congress, 6ième edition. Mars 01 – 02, 2013.

 

Kihal, A. Rodriguez-Prado, M. et S. Calsamiglia. 2022. The efficacy of mycotoxin binders to control mycotoxins in feeds and the potential risk of interactions with nutrient: a review. J Anim Sci. 2022 Nov 1;100(11):skac328.

 

Raymond, S.L., T.K. Smith et V.L.N. Swamy. 2003. Effects of feeding a blend of grains naturally contaminated with Fusarium mycotoxins on feed intake, serum chemistry, and hematology of horses, and the efficacy of a polymeric glucomannan mycotoxin adsorbent. J. Anim. Sci. 81 : 2123 – 2130.

 

Riet-Correa, F., R. Rivero, E. Odriozola, M de L Adrien, R.M.T. Medeiros et A.L. Schild. 2013. Mycotoxicoses of ruminants and horses. Journal of Veterinary Diagnostic Investigation. 25(6):692-708.

 

Wolter, R. 2014. L’alimentation du cheval. 3ième édition. Editions France Agricole.